Reportage client : La mesure, indispensable alliée du polissage de précision

Dans l’aéronautique, la précision est essentielle. Polissage et ajustage doivent être de haute technicité, tout comme les moyens de mesure. En vingt ans, Chesneau a gagné la confiance de nombreux industriels. Ses clients apprécient sa réactivité et l’expertise de ses opérateurs appuyée par un investissement important et régulier en métrologie, notamment en matériel Mitutoyo.

Chesneau est le parfait exemple d’une reconversion réussie. Le parcours de cette société familiale implantée à Sarrey en Haute-Marne est on ne peut plus singulier. Il démontre qu’à force de volonté et avec un peu de chance, tout est possible, ou presque. Cette entreprise, née en 1965, est spécialisée dans le polissage et l’ajustage de précision de pièces de haute technicité. Elle a su se réorienter et se développer loin de son univers d’origine, celui des couteliers et des ciseliers. « Au début des années 1990, l’époque où j’ai rejoint mes parents dans l’entreprise familiale, l’activité traditionnelle du bassin de Nogent s’est écroulée. Les quelque trois mille couteliers et ciseliers implantés il y a trente ans ont aujourd’hui disparu.

chesneau.png

«J’ai eu la chance de rencontrer le bon contact au bon moment en la personne du chef d’atelier des Forges de Bologne. Ce qui nous a permis de rebondir », explique Frédéric Chesneau, PDG et fils du fondateur de l’entreprise. À cette époque, les Forges de Bologne, qui doivent faire face à une importante baisse d’effectif suite à une épidémie de grippe, sont à la recherche de personnes capables d’ébavurer quelques pièces de toute urgence. Frédéric Chesneau répond à l’appel et surprend l’industriel par sa réactivité. Son entreprise fait ainsi son entrée dans l’univers de la fabrication de pièces exigeant un très haut niveau de finition pour le secteur aéronautique. Son savoir-faire est aujourd’hui reconnu aussi bien dans l’aéronautique par des groupes tels que Safran ou LISI Aerospace que dans les domaines du médical et de l’énergie. Pour preuve, son chiffre d’affaires est passé de moins de 400 k€ en 1996 à 8 M€ aujourd’hui. Ses effectifs ont également considérablement évolués, passant de quatre employés à près d’une centaine.  

Les clés de sa réussite : sa réactivité et sa technicité dans le polissage de précision. Si le polissage et l’ajustage s’effectuent essentiellement manuellement par des opérateurs qualifiés, la validation des opérations passe invariablement par un contrôle sur des machines à mesurer tridimensionnelles (MMT).

Dès 1996, Chesneau fait l’acquisition de deux MMT afin de pouvoir répondre à une commande des Forges de Bologne.

« Nous avons opté pour des machines Mitutoyo, car le même type d’équipement était employé par Forges de Bologne qui en était satisfait, tant du point de vue de leurs performances que de leur fiabilité dans des environnements industriels difficiles. De plus, nous avions l’assurance que les mesures seraient réalisées de la même façon, et la garantie de la cohérence de nos résultats », explique Frédéric Chesneau.

La capacité du constructeur japonais à pouvoir livrer rapidement ces MMT a également été un facteur décisif. « Lorsqu’on a un marché au pied de notre porte, on ne peut y répondre que si l’on dispose des machines à mesurer nécessaires au contrôle des pièces à traiter », souligne Frédéric Chesneau. Le polissage est destiné à supprimer les défauts et à mettre en valeur les produits. Cette activité se décompose en plusieurs étapes. À partir d’une ébauche forgée ou usinée et à l’aide des cahiers des charges très précis et des plans fournis par les clients, diverses opérations d’ébauche et de finition par polissage sont réalisées. Après le polissage de pièces telles que les composants de moteurs aéronautiques, plusieurs milliers de points sont mesurés sur les MMT. « On se bat sur des microns. Si trois points se trouvent hors tolérance, la pièce n’est pas qualifiée », observe Frédéric Chesneau. 

atelier.png

Il est donc indispensable de s’assurer de la répétabilité et de la fiabilité des processus de mesure. Pour une même pièce, le résultat doit être le même quel que soit le moment de l’année et quel que soit l’opérateur.

La validation d’une méthodologie de contrôle sur une pièce exige de conduire les mesures à quatre reprises, sur quatre machines différentes. L’opération doit être répétée six fois. L’écart doit être inférieur à 1 μm sur tous les points de mesure.

Pour un point d’écart, le programme doit être revu. « La mise au point d’un programme pour obtenir le résultat attendu sur une pièce complexe peut occuper notre expert métrologie pendant plusieurs mois. Celui-ci peut compter sur les équipes de Mitutoyo qui nous ont toujours apporté le soutien technique nécessaire à la résolution de nos problématiques », rapporte Frédéric Chesneau.

Le support technique et la réactivité de Mitutoyo conjugués à la fiabilité de leurs machines - qui n’ont jamais rencontré chez Chesneau de dysfonctionnements majeurs - ont conduit la société haut-marnaise à maintenir durant deux décennies sa confiance envers Mitutoyo. Son laboratoire de métrologie dispose de sept MMT du constructeur japonais sur les dix que compte son parc. La fidélité et la confiance mutuelle sont des valeurs chères à Frédéric Chesneau, qui précise cependant qu’il était important pour lui d’utiliser des MMT exploitant les mêmes outils logiciels, afin de « ne pas ajouter de la complexité à la complexité ». Sa philosophie : « un seul fournisseur, un seul langage ».

Cet autodidacte, qui se définit comme un « fonceur», et qui a appris les exigences de la métrologie sur le terrain, n’a pas hésité à investir dans des moyens de mesures performants pour accompagner le développement de son entreprise. Son parc de MMT, d’outils de mesures et de logiciels associés représente un investissement total de 2,5 M€. Ce qui démontre à quel point le polissage et l’ajustage de précision de pièces de haute technicité et la mesure sont intimement liés.

Certaines pièces sont mesurées individuellement avant et après leur polissage. Elles peuvent ensuite être renvoyées chez leur fabricant pour subir une nouvelle opération de forgeage ou d’usinage, avant de revenir pour un nouveau traitement chez Chesneau. Certains composants aéronautiques doivent être polis et ajustés après chacune de leurs huit étapes de fabrication. Avec à chaque fois, un passage obligé sur les MMT. En moyenne, trois heures de polissage réclament une heure de mesure. Certaines aubes de turbine subissent cinq opérations de forges.
Après chaque étape, elles reviennent chez Chesneau pour être polies, et 3 800 points sont mesurés à chaque fois jusqu’à l’obtention de la pièce définitive. Les va-et-vient des pièces entre les ateliers haut-marnais et leur fabricant sont donc fréquents. La réactivité est de mise. Pour cela, Chesneau possède deux camions et quatre camionnettes ainsi que sa propre équipe de chauffeurs pour assurer la livraison rapide des pièces entre son site de Sarrey et l’usine de production de ses clients. Lorsque les volumes de production l’imposent, les MMT peuvent être exploitées en 3x8, week-ends inclus. Une quinzaine d’opérateurs, disposant des notions de métrologie et des méthodologies de mesure, ainsi que la maîtrise des outils informatiques associés, sont chargés de la mise en oeuvre des contrôles. 

Operateur2.png

Lorsqu’un problème survient ou qu’une incohérence des résultats est relevée, l’expert métrologue intervient pour analyser la situation et trouver une réponse à la problématique, avec si nécessaire le support de Mitutoyo. Frédéric Chesneau est un chef d’entreprise modeste, mais il est cependant assez fier d’avoir fait figure de précurseur : « Nous sommes une toute première entreprise française à avoir mis en oeuvre une tête de mesure cinq axes sur nos MMT ». Avec toujours la même ambition : mesurer des pièces de plus en plus complexes avec la précision exigée en un minimum de temps. Cette tête a été employée pour la première fois pour mesurer un disque de turbine sans le retourner. En mécanique, lorsque des milliers de points doivent être relevés avec une grande précision et une très faible tolérance, la rapidité est une notion toute relative. Cependant, si les MMT acquises en 1996 sont, il est vrai, moins rapides que la dernière génération de MMT Mitutoyo, « elles conservent toutes leurs capacités en termes de mesure. Et surtout, comme elles sont équipées des mêmes logiciels que nos nouveaux équipements, elles profitent donc des progrès des calculateurs, et cela nous assure l’uniformité des traitements logiciels par l’ensemble des machines du parc », explique Frédéric Chesneau, qui souligne qu’outre les équipements de mesures, les logiciels et le matériel informatique associé impliquent des investissements importants pour la sauvegarde, l’archivage et la protection des données. Investir dans des moyens de mesures performants a toujours été une nécessité pour l’entreprise de Sarrey afin d’obtenir de nouveaux marchés. Elle se prépare à accueillir une nouvelle machine d’ici la fin de l’année. Cette machine n’a pas vocation de renforcer le parc MMT en salle de métrologie, mais le robot de mesure Mach 3A de Mitutoyo sera installé au pied des centres d’usinages. Il fournira le rapport de mesure avec les points à corriger trois fois plus rapidement qu’une MMT classique, sans que la pièce ne quitte l’atelier. Toujours le même souci de conjuguer réactivité et qualité.

Youssef BELGNAOUI

CEM - N°60 -  SEPTEMBRE 2017

Consultez l'article